Eh bien, voilà, nous y sommes. Je viens vous dire aurevoir.
Décembre est le meilleur mois pour tourner la page et les longues soirées d’hiver accueillent volontiers les questionnements qui accompagnent les adieux. Celui-ci n’est pas pour moi virtuel seulement. Souvent, des lectrices de Générations m’ont abordée dans la rue, dans le métro, au supermarché. J’ai côtoyé quelques-unes d’entre vous sur des sentiers de montagne. J’ai aussi lancé des petites annonces en fin de magazine, des appels à témoigner qui m’ont menée vers des rencontres amicales, stimulantes.
Je mets donc des visages sur « la lectrice de Générations » (moins hélas sur le lecteur). Je peux imaginer certaines de vos existences. Et je me suis demandé, en pensant à cette dernière chronique, ce qui de moi a filtré vers vous au fil du temps, pendant plus de dix ans de collaboration au magazine. Nous autres chroniqueurs et chroniqueuses avons la chance d’écrire très librement en disant « je ». Pour ma part, dans cette rubrique dite Corps et âme, j’ai toujours choisi très consciemment ce que j’allais exprimer, le ressentant même physiquement. Comment j’allais raconter un instant vécu, entendu ou observé.
Je ne suis pas douée pour la réflexion d’ordre général ni pour la fiction. Je n’invente donc pratiquement rien quand j’écris. J’observe et je ressens. Mais comme avec mes compagnes les fleurs, je choisis, je compose, j’ajoute ou retire des éléments pour que le rythme et l’harmonie du tout me conviennent. Je me souviens comme si c’était hier d’un texte sur l’enterrement en pleine bourrasque de neige d’une ancienne collègue aimée de tous. Qui n’a pas vécu des moments de communion autour d’une personne disparue. J’avais beaucoup aimé écrire quelques années plus tôt une vision, était-ce un rêve, liée au passage des 70 ans. Je vois encore le paquebot de l’âge tournant insensiblement sur son axe pour s’orienter vers le soleil couchant. Mais j’ai renoncé à poursuivre le récit de mes tribulations en bagnole, instants jubilatoires ou rageurs dont on m’a – très gentiment – suggéré qu’il y en avait eu beaucoup !
Isabelle Guisan
04/12/2025
Générations